Fantastic four

Voilà que sont partis mes Fantastic Four. Hier, mardi, nous nous sommes dit aurevoir, mais c’est jeudi dernier que nous avons pour la dernière fois été, les uns pour les autres, professeur et élèves, encordés les uns aux autres dans notre exploration du pays des Anciens entre les quatre murs de la salle N1. Le…

Bois sacré, mer

ainsi, devant soila splendeur du printemps qui s'étirelevé sur les collines comme, à l'orée de lèvres éperduesun crépitement d'auroreet qui s'en vientà vaste foulée blonde par le Bois Sacrésemant parmi les pinsdes soleils à foison des rires à l'étoufféedouceurs de résine sous le pasgerbes d'épines jeunessur son épaule la falaise suppliante le sanctuaire à bout de…

Messe du dimanche soir

J'aurais dû écrire ceci hier. Déjà cela m'échappe ; la pression n'est plus.Quatrième dimanche de Carême. Messe du dimanche soir, pour cause de météo répugnante le matin. Le fils est parti plus tôt - voilà quelques semaines qu'il sert la messe. Un ami français s'étonnait de ce qu'il ne s'y soit mis qu'à quatorze ans…

M.

M. n’était pas en cours aujourd’hui. C’est mardi et j’ai double période de Virgile avec les terminales de 13.50 à 15.30.Après bus duty - sous le crachin - comme je remonte vers le bâtiment pour récupérer mes affaires et rejoindre la salle du E block où Matt Thomas parle de Sylvia Plath et de son…

Dans le bus – 2

9 heures 24 Silhouettes d’oiseaux dans les arbres encore nus - noires sentinelles.Mousses fluorescentes accrochées aux talus. Ciel de plomb. Brouillard- on ne verra rien du plateau ce matin.La pluie est suspendue dans l’air et, microscopique, vous fouette à l’horizontale. Trop menue pour que l’on cherche à s’en défendre, trop assidue pour qu’aucune partie ne…

Plateau

20/02 - 8h20 - dans le bus Entre Canterbury et Douvres ça monte puis redescend. Au milieu, ça grimpe sur un plateau.La lumière est pâle et cendrée ce matin, le ciel ininterrompu voilé d’une gaze de soie grise aux franges blondes.Sur l’herbe brune et rase du plateau j’aperçois pour la première fois une poignée de…

Rue déserte au soleil

Qui dirala danse pour elle-mêmed’une rue déserte au soleil qui dira ce secret qui délogeinfimement le coeurd’une rue dérouléesans détour, et sans hâtesous le fer du soleiltandis que s'abolitsa course vers le pointde fuite le ciel trace une route lui aussibleue entre les lignes fuyantes des toitset voilà qu’au centre et qu’autourdanse la solitude c’est…

pépites

Puisque de "vrais textes" sont désormais au-delà de mes capacités, voici quelques pépites, graines de joie, au petit bonheur la chance. Hier, il faisait beau - considérant l'assiduité impitoyable de la pluie sur notre île cet hiver, on dira des jours où elle s'absente par intermittences qu'il a fait beau. Il faisait donc beau, c'était…

En lisant le bouclier d’Enée

Plus que quelques jours avant les vacances de Noël.Besoin d’écrire, jamais le temps.Jamais le temps, mais aujourd’hui, aujourd’huiil me faut dire. En classe avec les terminales durant la « double période » qui clôt la journéedans la lumière insuffisante et crue d’une unique rangée de néons bataillant contre l’assombrissementdeux élèves seulement, et moi(des deux autres : l’une en…

Goodbye Father John

Ce dimanche, dernière messe chez nous de Father John. Un doux, dans son regard, dans sa posture - haute silhouette aux bras timides, ne semblant qu'à regret quitter ses flancs, visage et barbe d'ascète -, dans le combat de chaque sermon contre sa terrible dyslexie, dans la façon même qu'il a de ne jamais reculer…

Résignation

Résigner. Se résigner. Ce que ça vaut ; si c’est bien là ce que nous faisons, le mot juste pour désigner ce que nous vivons, pour décrire ce que l’honnêteté nous oblige à constater : là où brûlait une flamme qui menaçait incendie, une langue de feu et de désir, un fouet de rébellion et de lumière…

English summer

Juillet, six heures du soir. Sur la route de Douvres à Cantorbéry.  Ma foi, il n’y a rien de semblable à l’été anglais. Certes, les printemps d'Angleterre sont beaux, dès février illuminé de la candeur des pruneliers et jusqu’aux roses luxuriantes de mai. Les jardins des printemps anglais ont une effervescence de mousse piquée de…

En rentrant de Marseille

Semaine Sainte au pays de la lumière.Arrivée dans la nuit. La voiture serpente le long de la corniche, la mer en contrepoids sur la droite, moire plus noire que le ciel, percée de feux aigus et minuscules, magnétique.Au matin, à peine les volets roulés, voici que tout à coup se déversent, par-dessus quelques toits de…

L’amour n’est pas consolation (Simone Weil)

Descendre d'un mouvement où la pesanteur n'a aucune part... La pesanteur fait descendre, l'aile fait monter : quelle aile à la deuxième puissance peut faire descendre sans pesanteur?La création est faite du mouvement descendant de la pesanteur, du mouvement ascendant de la grâce et du mouvement descendant de la grâce à la deuxième puissance. p.4La…

Matin

Petits matins de cristal et de cobalt Nuits de givre étoilé Je marche, les doigts de la nuit repliés sur mon coeur Sans crainte, une luciole au ventre - Le désir fend le froid et le velours obscur Trottoirs poudrés de diamant. Fête cuivrée sous le jupon des lampadaires Craquelures, esprits du bris et de…

Sol Invictus

Soleil d’hiverlumière à nulle autre pareilleenvergure d’albatros, vaste et brève, lente et hâtive belle Inespérée (comme cette fille là-bas dont le profil perdu, le velours seul d'une joue, promettait aubes)intime, à l’opposé de l'emprise de l’été, se déversant par les voiles du salon, à grands plis horizontaux, jusque dans le coin ébloui de la vision,…

A vide

De ces journées, de ces soirs où il est difficile, peut-être, de se l'enlever du diaphragme - cet encombrement - cette masse nerveuse, fuyante mais inexorable - ce poids de désir - à vide.Désir n'est pas le mot, car ce n'est pas charnel, pas directement du moins, pas comme l'éclair dans le regard quand épaules…

per umbram – théâtre d’ombres

Après d'interminables jours de pluie, enfin ! un rayon de soleil. Soudain février semble être là, déjà, dans son éclaboussement ébloui - un scintillement peut-être dû aux myriades de goutelettes encore suspendues dans l'air, qu'un soleil de novembre anglais n'est pas de force à résorber. Le coeur et les yeux clignent, entre rire et larmes.…

Crépuscule d’octobre

Il est presque six heures, sur le chemin du retour. Comme je quitte l'enceinte de la cité - une frontière désormais immatérielle, dont les derniers signes physiques (une pierre carrée, une borne milliaire, le tracé fantôme d'un rempart, la vibration d'un pomoerium) ne sont plus déchiffrables que pour une minorité, et qui pourtant demeure perceptible…