Suppléante au pied levé de Valentyne (malheureusement très prise ce mois-ci), je tente de me frayer un chemin entre les sujets que septembre impose à mon esprit auquel quelques années d’enseignement ont fait prendre un fâcheux pli : soucieuse d’éviter le tollé que ne manquerait pas de provoquer une invitation à raconter vos vacances en hexamètres dactyliques ou à promener un nez mnémonique sur les effluves doux-amers de la rentrée scolaire (avec ou sans l’accent de Pagnol), je saute par-dessus les amas de feuilles mortes, contourne une souche où deux villages de champignons se disputent âprement le centimètre-carré, écarte d’un doigt précautionneux un bras de ronce défiant la cueillette et débusque un chemin de traverse visant un coteau où s’inaugurent les vendanges. La suite est d’une logique implacable : qui dit vin dit victuailles (d’aucuns trouveraient sans doute plus approprié d’inverser la proposition, mais ce mois-ci c’est la grenouille qui décide, na). Qui dit victuailles, dit épices. Nous y sommes.

En septembre, c’est imparable, les agendanautes s’intéresseront aux épices (large, on acceptera d’inclure les herbes aromatiques et les condiments). Feuilles, fleurs, graines, bulbes, écorces, poussières plus précieuses que l’or, destinations de voyages au long cours où il est de bon ton de laisser sa fortune ou sa peau, nous convoitons en elles le pouvoir de révéler, métamorphoser, vivifier, colorer, émouvoir (parfois au-delà du tolérable, héhé), de percer le tissu fade du quotidien d’une pointe adamantine qui fait cristalliser un instant corps et esprit (la mémoire tressaille). D’une nécessité de fait elles peuvent faire plus qu’un plaisir, une expérience spirituelle (tout dépend de celui ou celle qui est aux commandes, je vous l’accorde). Quand bien même on aurait les papilles timorées, on ne peut nier que leurs noms se récitent comme les escales d’une aventure onirique : safran, muscade, poivre, cannelle, moutarde, gingembre, cumin, coriandre, clou de girofle, anis étoilé, piments, curcuma, ajoutez ici ce qu’il vous plaira.

Et alors, me direz-vous, on écrit une recette ? Si c’est ce qui vous vient, absolument, il n’est rien qu’une pincée d’ironie ne rende délectable. Ou bien assaisonnez sans révérence une ribambelle de mets, à la Rabelais, à la Montaigne, à la Zola, à la Maupassant, à la vôtre ! Servez-nous une anecdote salée, une fiction pimentée, retroussez-vous les manches, nouez ferme ce tablier, débouchez le pétillant, faites-nous saliver, mettez-nous le feu aux tripes (oui, d’accord, j’ai faim; et non, il n’est donc pas strictement nécessaire de parler cuisine, même s’il faut qu’une épice au moins joue un rôle dans votre texte).

Vous avez jusqu’au 23 septembre (nul doute qu’on affrète un navire en moins de temps), après quoi il s’agira, selon les usages de l’Agenda Ironique, de voter pour les textes préférés et le prochain hôte. Les résultats tomberont le 30 septembre, jour de mon anniversaire (pour moi ce sera un carrot cake overcannellisé, merci).

P.S. : “Pass the flavour” était la phrase en usage à l’université de Durham où étudia mon cher et tendre, quand il s’agissait de se faire donner la salière.

90 thoughts on “Pass the flavour ! (agenda ironique de septembre)

  1. Ah, sûr qu’on y sera : le sujet est appétissant comme une tarte aux pommes sans cannelle, pour moi, thanks a lot ! ou comme un plat indien, ou comme … enfin, on verra. Y a plus qu’à ! Mille merci, Frog, pour ce sujet qui est déjà traité en soi par ton très beau texte, comme toujours. Décidément, si c’est Carnet paresseux qui t’a dénichée dans les rets du Net, il avait le nez fin, le bougre.

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  2. On disait ça aussi à Poudlard, où j’ai fait mes humanités.
    Beau sujet, ça me fait bien bien envie, comme ils disent de par chez moi…
    Bisous épicés
    ¸¸.•*¨*• ☆

    PS spécial Anne de Louvain : ne confondons pas les rêts du net avec l’arête du nez… muahaha !

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  3. Merci Frog ! Voilà un beau thème, plein de gout, parfum, poudre et fragrance…. ! je me réjouis d’avance de lire les agendistes ironiques et je me demande bien ce que je vais raconter, la bouche pleine et le nez au vent !…

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  4. Moi je n’avais plus fin car le repas dominical fut copieux plus que de raison, mais le beau sujet que voilà réveille mon appétit, au moins mon appétit de mots, de vie, de lumières et de cœurs battants. Saurai-je retrouver le chemin de mes mots qui se dérobent (c’est agaçant) pour honorer la gaité gourmande de cette consigne? Je vais tenter, entre les bourrasques de la rentrée scolaire 😉

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    1. Comment cela, désactivés ? Ce lien marche ! Enfin je ne suis pas sûre de savoir ce qu’est un rétro-lien, il faudra donc me pardonner, la digestion d’un missionnaire farci m’occupe l’esprit autant que l’estomac. 😉

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      1. La notification automatique d’un article par commentaire cité dans un autre article, voilà ce qu’est un retro-lien. Si ça marchait je n’aurais pas eu à le faire à la main.😉
        Bon appétit 😈

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    1. Oh, il semble que mon commentaire sur ton texte ait disparu… parfois mes commentaires vont directement dans la corbeille des indésirables…

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                1. Ah la la, je vais retenter de soumettre mon souci aux experts de WordPress. La dernière fois, ils ne m’ont répondu que des âneries. Non, je ne suis pas couchée, je lutte contre la fatigue comme tous les soirs…

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                  1. Tiens j’ai eu un souci similaire: plusieurs personnes m’ont dit que leurs commentaires n’apparaissaient jamais, et moi, je n’en avais jamais aucune trace ( mm dans les indésirables). Mais j’ignorais qu’il y avait des experts à qui poser les questions!
                    Mais pourquoi luttes-tu si le sommeil est là? ( j’aime la nuit et son silence, alors je comprends que pour vivre un peu de nuit on repousse le sommeil: est-ce cela?)

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        1. La vérité : je n’étais pas du tout partie pour l’agenda, je répondais à l’impulsion du moment, et les épices se sont insérées assez logiquement. Lance-toi, le renard te rattrapera. 😊

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          1. Hello. Je… enfin tu… tes textes sur ton blog regorgent d’ironie, d’un regard ironique sur les circonstances de l’existence, d’ailleurs ton blog mème est essentiellement une tentative ironique.

            Peut-on déceler, isoler, un seul moment d’ironie dans “pride & prejudice” ? bon oui il y en a, mais mon propos était de dire que le roman tout entier est voué à l’ironie, sans que ce soit particulièrement recherché, l’esprit de l’auteur, l’écrivaine est tellement imprégné de l’ironie de l’humour anglais que …
            Ha bon tu n’es pas anglaise ? Moi non plus remarque, et ça ne me gène pas du tout. Enfin si par ma grand-mère, une petite bourgeoise de Leeds, à qui je pardonnerai sa cruauté parce qu’elle a subi celle toute différente de son bourgeois limousin de mari. Ce n’est pas comme mon Bon-Papa et ma Bonne-maman qui…

            Ho et puis arrête de tout toujours ramener à toi ! ,)

            http://planet-vie.ens.fr/content/epices-et-herbes-aromatiques Un lien sur les épices

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            1. J’écris parfois avec amusement, c’est vrai, sans aller jusqu’à l’ironie qui pour moi implique une dent acérée, mais le lecteur n’est pas obligé de lire comme j’écris. Si tu vois de l’ironie dans mon blog, tant mieux, ca me permet d’échapper au hors-sujet ! Tu connais Leeds ?

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