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Regardez. A présent je vois. Je vois les choses réelles, je vois les choses qui existent. Voyez-les surgir. Je vois à travers les choses comme à travers un voile léger qui me couvrirait les yeux. Je vois à travers les choses aussi bien qu’à travers mes yeux. Les villes rêvées, c’est elles qui étaient réelles. Les choses sont tout juste le spectacle frémissant d’elles-mêmes reflétées sur les eaux de mon regard. Seul ce qui ne fut jamais frappé de réalité existe en réalité. L’événement est le déchet que Dieu a rejeté. L’apparence n’est pas réelle, elle est le dos des mains de Dieu, elle est l’ombre de ses gestes.
La Mort du Prince, Fernando Pessoa
Version établie par Luis Miguel Cintra, traduction de Patrick Quillier
Complément au Privilège des histoires vraies dans le blog de Joséphine Lanesem.
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Ah ! Ces dialogues qui se nouent et se tressent entre les âmes !
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Allers et retours dans la petite voiture rouge de l’enfance. 🙂
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En lisant ce texte, mon coeur s’écrie avec l’aveugle “Rabbouni, que je voie!” (Mc, 10, 51). (la beauté des âmes, et que j’en sois émerveillée, par pitié)
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L’ombre est aussi réelle que le geste, et parfois plus : l’ombre subsiste même si on ne bouge pas.
merci pour ce beau texte !
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Mais que passe un nuage, qu’avance le soleil vers son zénith… Merci pour votre joli commentaire !
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Merci. C’est magnifique. J’aime où Pessoa me porte. Ce point d’équilibre, à la fois instable et tranquille comme tout équilibre. C’est toujours au bord de ne pas le comprendre que je le comprends.
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Tu as vraiment une façon unique d’éclairer les choses. 🙂
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Disons que j’essaye de mettre les mots exactement sur ce que je ressens, parfois ça rate, parfois ça réussit. Du tir à l’arc. 🙂
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Combien de temps mettrez-vous pour atteindre Berlin ?
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Nous faisons des étapes chez des amis, donc samedi soir je pense !
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Cela me rappelle une autre phrase de lui : ne pas approcher trop les choses au risque de détruire leur capacité à être rêvées.
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Je pensais cela justement au sujet des arbres, l’autre jour, me demandant jusqu’à quel point leur puissance poétique pouvait supporter l’expertise botanique. Peut-être est-elle de force à supporter les plus intrusifs des microscopes.
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Comme pour les nuages, nommés et répertoriés relativement tard par Luke Howard (cumulus, nimbus, etc) ce qui tue toute poésie, parce qu’au lieu de les suggérer, de les faire advenir, il les épingle en scientifique. C’est un romantique qui dit ça mais je ne sais plus lequel… Il faudrait poétiser les termes botaniques, parvenir à les rendre rêveurs, certains le sont déjà je pense… Tu le sais mieux que moi !
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Je trouve les mots scientifiques souvent poétiques, ce qui me gêne, c’est le changement du regard que la connaissance scientifique induit parfois… Comme quand le médecin soigne ton corps comme s’il était sans âme. Après, tout le monde ne croit pas en l’âme…
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Mais tout le monde devrait croire à la personne. Tu as raison, c’est le regard que les mots véhiculent plus que leurs sonorité ou leur origine.
Tout le monde ne croit pas en l’âme, mais devrait croire au moins en la personne.
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Autre sujet. J’ai retrouvé un peu mon garçon dans une de tes nouvelles, et aussi mon merle ! Dans le texte que j’ai commencé, il y a une dame qui parle à son merle, comme ta merveilleuse Simplette. J’ai adoré l’histoire de Clotilde.
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Cela ne m’étonne pas que tu aies aimé “Sang Coeur” puisque tu as une soeur 😉 Je suis heureuse aussi que “L’enfant miraculeux” t’ait plu, c’est la seule histoire qui a manqué sa destinataire, parce qu’elle a cru que je lui donnais le rôle de la mère alors que je lui donnais celui de l’enfant. J’ai hâte de lire ton histoire ! De mon côté j’ai été inspirée par le film de Pasolini uccellacci uccellini, un père et un fils qui vont nulle part accompagnés par un merle très bavard.
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Je suis allée voir l’expo Vermeer au Louvre il y a peu, j’ai eu l’impression d’y être encore en lisant Sang Coeur… Tout y est beau, mais ce passage surtout m’a saisie : “Une tristesse arrive, une clarté à ras de terre qui illumine le monde et le pulvérise sous sa poussée. Une à une, les villes s’effondrent lentement. La sienne se défait la dernière, les débris projetés dans les airs y restent suspendus, comme pris d’apesanteur. Clotilde regarde l’immensité misérable, puis ferme la fenêtre. Survivre à la douleur, oui ; mais à la tristesse ? C’est plus traître.”
Merci pour la référence du film, ça donne envie de le voir.
Aujourd’hui, un manuscrit m’est revenu… sans lettre ! Je soupçonne qu’il s’agit du grand G. En tout cas, le manuscrit est comme neuf et pourra être renvoyé ! 😉
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Comme c’est étrange de s’entendre citer. Merci pour la comparaison avec Vermeer. 😉 C’est une histoire de délicatesse et de violence. La mélancolie telle que je l’ai connue, un état de sensibilité si sensible qu’elle devient insensible et se blesse pour renaître.
Pour le manuscrit, quel sans-gêne ! On donne son âme et elle nous revient sans un mot, retournée sur elle-même en refus. J’admire ta force, renvoie-le aussi vite et ne te laisse pas abattre !
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Oui, je crois te deviner dans ces nouvelles. Tu es une sorte de fée. 🙂
Pour le manuscrit, je me dis que la lettre suit peut-être, mais sans trop y croire. En tout cas, je ne me sens pas encore abattue du tout. Et merci beaucoup pour tes encouragements ! 🙂
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Ca y est, lettre type reçue, c’était bien Gallimard. 😉
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